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Carnets de voyage [11] - La jeunesse tunisienne déchirée entre le clubbing et la mosquée

Par Aida Cherif :

discotheque-tunisiePendant les grandes vacances d’été, quand j’étais encore enfant, au moment de la sieste,  si on ne veut pas dormir eh bien on doit partir  au « kottéb » l’école coranique.

 




Il s’agit d’un local prêté par les habitant du quartier au « meddeb » (un homme d’un certain âge connaissant le coran par cœur) afin d’enseigner et faire apprendre aux enfants le sacré coran.

 

 

 

kotteb-ecole-coranique-tunisie
C’est un moyen enrichissant pour occuper les enfants pendant les vacances et surtout les familiariser très tôt avec la langue arabe classique, il y a 15 ans ces écoles existaient encore. Aujourd’hui ce sont les publinets, les jeux vidéo, l’internet, la piscine et la plage qui ont remplacé le kottéb mais cela n’a pas empêché pour autant la présence massive de jeunes dans les mosquée et le phénomène connait son apogée depuis cinq ans ou peut-être un peu plus,  un spectacle auquel  le Tunisien de 60 ans n’est pas habitué, des fillettes et des garçons de 15-16ans allant aux mosquées, cela est trop voyant dans  les quartiers populaires ou pauvres de la capitale et dans les petites villes ou villages de la Tunisie ; de plus en plus de filles à l’âge de 7-8ans sont voilées parfois même avec le niqab.

 

Je n’ai rien contre le port du voile en soi mais je déplore les motivations de son arrivée et son port en Tunisie spécialement, on a l’impression que c’est juste un phénomène de mode, une tendance qui tendra à disparaître, seulement c’est juste une impression, ce n’est guère une mode mais un endoctrinement sauvage causé par la masse importante de chaines de télévisions où des pseudo- théologiens ou prêcheurs de la parole de Dieu s’amusent à faire les charlatans du coran en inculquant à l’audience des bourdes et des boulettes en tout genre, allant jusqu’à créer et inventer des versets coraniques pour mieux convaincre les plus sceptiques des sujets.

 

Je ne voudrais pas m’étaler encore plus sur le sujet mais je me contenterais de cette constatation faite par ma grand-mère, une femme pieuse qui a toujours fait ses cinq prières et connait les 66 partis (hezb) du sacré coran : «  en voyant ces jeunes filles avec cet accoutrement, j’ai l’impression que je suis depuis toujours une mécréante et que mes prières depuis l’âge de 7 ans sont nulles et n’ont aucune utilité »

 

La Tunisie est un pays musulman certes mais a toujours été très modéré et cela devrait rester ainsi tant que l’économie du pays dépend  de son ouverture et de  son Islam moderne et modéré.

 

En plus de l’école coranique ou le « kottéb », dans les années 80s, il existait des clubs d’enfants et des maisons de jeunes où les près-ados et adolescents s’adonnaient à des activités diverses et variées : sportives, artistiques et autres. L’été, d’autres activités s’organisaient autour du thème de la mer, des carnavals et des spectacles sont donnés par les enfants, tout cela avec très peu de moyens mais beaucoup de volonté.

 

scouts-tunisiensAujourd’hui, ce que je vois, l’été est offusquant, des mamans désespérées, ne sachant pas comment occuper les journées de leurs enfants quand elles travaillent, il manque des centres de loisirs, des établissements où le jeune peut occuper son temps libre l’été en s’instruisant et en apprenant des choses qui lui sont difficiles à apprendre durant la saison scolaire.

 

En réalité, les Tunisiens attendent toujours que l’Etat fasse des choses, or nous savons tous que la Tunisie n’est pas un pays riche et même si ce fut le cas, les loisirs et autres institutions à but social n’incombent pas forcément aux appareils de l’Etat. Dans les pays nantis, ce sont les milieux associatifs qui créent et fondent ce genre d’institutions et le plus souvent les personnes qui y travaillent ou y animent des activités pour les jeunes sont des personnes bénévoles qui offrent leur temps et leur savoir pour le bien-être de la commune, la ville ou le village. Tant que le tunisien n’a pas cette mentalité de bénévolat (travailler sans percevoir de rémunération) il n’y aura jamais de loisirs autres que ceux proposés par l’Etat ou les établissements publics et qui semblent ne pas satisfaire loin d’être assez nombreux ni diversifiés pour satisfaire une nouvelle génération et un nombre important de jeunes.

 

Je crois que ces mamans désespérées devraient s’organiser ensemble et monter des projets associatifs et mobiliser des cadres spécialisés dans des activités artistiques, sportives et autres de façon bénévole pour servir et contribuer à l’épanouissement de cette nouvelle génération de jeunes qui sont de plus en plus cloitrés devant leur pc ou l’écran tv ou encore à jouer dans les rues en plein soleil .

 

discotheque-mineurs-tunisiePar ailleurs et en l’absence de loisirs instructifs pour nos ados, je fus étonnée par cette nouvelle tendance et mode de discothèque ou club de nuit , les jeunes en Tunisie , ceux de cette génération s’y rendent  de façon systématique et machinale car c’est la seule distraction offerte aux jeunes après les cafés, ce qui est encore plus frappant c’est la nouvelle mode des discothèques pour les mineurs (les moins de 18 ans) une fois par semaine de 20h à minuit, histoire de les entrainer et les habituer à ce monde de la nuit comme si c’était un art ou une discipline pouvant enrichir l’intellect de l’ados.

 

J’avoue que moi-même j’y ai emmené mon fils  un soir dans une boite branchée qui ouvre ses portes aux mineurs le lundi soir, à l’arrivée à 20h, on se croirait devant un lycée ou collège, presque tous les gamins sont accompagnés de leurs parents, du coup des rencontres entre parents qui se connaissaient depuis le lycée se font là juste devant cette discothèque et la situation est presque comique car dans notre jeunesse à nous, les clubs de nuit c’était seulement pour les grands. Bref, devant cette boite très huppée et branchée de Hammamet, on en voit des choses se passer à la sortie à minuit, qui sont à faire gerber.

 

Comment peut-on permettre à ces ados des agissements dignes de bandits notoires,  en fait ceux à qui on a refusé l’accès en boite attendaient ceux qui en sortaient pour les tabasser, et c’est parti en cacahuète, la police a embarqué quelques uns, une maman a été frappée par un gamin dont la sœur à été draguée par le fils de cette maman etc. sans compter que des gamins sortaient de la boite complètement défoncés pourtant on nous a juré qu’il n’y avait pas de boissons alcoolisées à l’intérieur, mais on m’a raconté que certains gamins ramenaient avec eux les mignonettes (les petites bouteilles) de vodka, whisky etc. qu’ils ont piqué à leur parents de la maison, une maman qui a pu entrer pour chercher sa fille nous a balancé que les gamins se comportaient bizarrement et que parait il de la drogue douce circulait aussi entre les jeunes dont les âges allaient de 10 à 17 ans mais moi, croyez le ou pas, en regardant quelques mômes je peux vous assurer qu’ils avaient plus de 18 ans, non pas à leur taille mais leur traits de visages donnaient plus vieux que 18-20ans .

 

Vous imaginez un peu des filles de 12 ans livrées à elle même dans une ambiance malsaine et avec des jeunes hommes de 17 ans et même un peu plus ? Oui on peut donner à nos enfants la liberté d’aller et venir comme bon leur semble mais cette liberté doit être conditionnée et surtout bien contrôlée. Ce n’est pas parce que je vis à l’Etranger que j’ai fait le constat de ces deux images opposées de la jeunesse tunisienne mais, des personnes vivant en Tunisie l’ont trop bien remarqué, et craignent réellement le danger qui guète cette société qui se fragilise peu à peu, par le manque de repères aussi bien chez les jeunes que chez leurs ainés. Ce déchirement est le fruit de l’existence de deux couches sociales séparées par un grand fossé que les médias, sous toutes leurs formes, ont creusé. Ce déchirement est aussi la résultante d’une perdition des valeurs et attachement exagéré, aussi bien de l’adulte que du jeune Tunisien,  au paraître et aux futilités, ce sont les parents eux même, sans le savoir,  qui  donnent cette ligne de conduite à leurs enfants et ce, dès la petite enfance.

 

 

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