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Carnets de voyage [5] - L'autre facette de la médaille
Par Aida Cherif :
Je tourne toujours autour du même sujet, cela me tient à cœur et j’ai très envie d’en faire part à ceux qui voudront bien le savoir ou à ceux qui l’ont déjà constaté comme moi à chacune de leurs visites ou même à travers les années alors qu’ils résident en Tunisie, dans ce beau pays source de mes joies et mes peines.
Autant les jeunes femmes du planning familial m’ont semblées simplettes, réalistes mais aussi vivant hors du temps, autant celles que je côtoie dans le petit village de vacances où je réside depuis 7 ans tous les étés, sont extravagantes, libres, libérées et parfois même libertines.
Je n’ai jamais été frappée par tant de contradictions en Tunisie, je ne sais pas si cela est dû au fait que je ne visite mon pays qu’une fois par an, ou, juste une vérité que tout le monde constate mais reste inavouée par la majorité …
Je suis de ceux et celles qui ont toujours préféré la modération et le juste milieu en toute chose, nous sommes tous d’accord pour dire que l’excès ne peut en aucun cas signifier la suprématie ou l’excellence, mais, ce à quoi nous assistons actuellement en Tunisie, surtout, pendant la saison estivale, frise avec l’extrémisme, un extrémisme en tout : on se maquille à outrance, on se dévêtit à outrance, on insulte ouvertement et à haute voix, pour des broutilles, et on emploie un langage ordurier de façon systématique et machinale avec ou sans raison, l’insolence, l’arrogance, le manque de respect et la débauche sont devenus une facette, une marque déposée chez la jeunesse tunisienne et aussi une ligne de conduite, empruntée par tous presque comme s’il s’agirait d’une tendance d’une mode dans laquelle les jeunes s’identifient et celui qui n’est pas « IN » serait banni et marginalisé.
Un soir, comme tous les soirs presque dans le même café, nous étions assis, entre amis, à discuter, commenter et siroter du thé, de la citronnade et fumant la chicha, la fameuse aux pommes, à cette heure ci de la soirée le café est surpeuplé sur la terrasse mais à l’intérieur, malgré la climatisation, peu de gens s’y installent, j’ai fini par comprendre la raison : les jeunes font de la salle intérieure du café leur QG (quartier général). Tous ou presque équipés d’ordinateurs portables ou du dernier cri en technologie : le notebook ou IPAD ou je ne sais quel autre invention, tous connectés à travers le modem du cafetier avec le wifi et tous surfant sur facebook. Ah lala !! Quel conformisme !!
Ceux qui ne sont pas équipés d’un ordinateur ou d’une de ces gadgets, (que les occidentaux ont crée et fabriqué pour se faciliter et la vie et le travail) se laissent glisser sur les fauteuils du café, y’en a même qui ne se gênent pas du tout et se croient vraiment chez eux à la maison.
Un garçon, la vingtaine, et deux filles plus jeunes, tous en short très court, cigarettes à la main, ont envahit la salle, et ont occupé le grand canapé du fond, le garçon au milieu, les filles se sont allongées comme sur un lit en posant leurs têtes sur les deux cuisses du jeune homme qui ne pouvait s’empêcher de caresser les cheveux de l’une et les cuisses de l’autre qui a levé ses jambes carrément en les posant contre le mur .
Je ne sais pas si j’ai bien schématisé la scène mais de là où j’étais, la scène devant mes yeux m’a fait oubliée que j’étais dans un café, réputé pour être un lieu public fréquenté par des familles, des jeunes et des moins jeunes, des touristes aussi, des personnes âgées et même des personnalités publiques qui s’y rendent car c’est à côté de leur maison de vacances, bref des scènes comme ça, selon le serveur du café, c’est devenu une coutume et le cafetier n’ose pas intervenir pour ne pas avoir leurs parents sur le dos, vu que ce sont des enfants de gens connus et ont des pouvoirs…
Si l’image, des deux filles allongées sur le canapé du café en short et cigarettes à la main, se faisant caresser par le jeune homme assis au milieu, m’a choquée, eh bah ce matin, en entrant dans ce même café pour prendre mon petit déjeuner avec mon mari et regarder nos mails, l’image de ces deux très jeunes garçons 14-15 ans m’a laissée sur le Q (désolée pour cette expression), l’un fumant une chicha, l’autre une cigarette et les deux buvant des cafés noirs, j’en étais tellement outrée que j’en ai parlé avec le cafetier, sa réponse et sa réaction m’ont laissée perplexe et cela m’a encore démontré que face à l’argent, les valeurs disparaissent.
Le comportement désinvolte du cafetier m’a rendue malade, imaginez votre gosse de 15 ans fumant dans un café sans qu’aucun adulte ne le reprenne ni le lui interdise. Et dire qu’en Europe, les buralistes, cafetiers ou barman sont lourdement pénalisés s’ils vendent ou servent du tabac ou de l’alcool à des mineurs (moins de 18 ans)
L’absentéisme de l’autorité parentale en Tunisie, durant cette décennie a engendré une jeunesse pourrie, gangrenée par les mauvaises habitudes, les mauvaises manières, l’insolence, l’amour du paraître et le manque de maturité. Au moment où leur parents se déchaînent au travail pour payer la multitude de crédits à leur charge, les enfants eux se contentent de demander, exiger et vouloir mille choses afin d’être comme le copain, le voisin ou encore le cousin.
À qui incombe cette lourde tâche d’éduquer, de bien élever et de, surtout, inculquer à nos enfants ce que l’école ne peut enseigner ? Aux parents ? Oui mais si les parents eux aussi sont arrogants, matérialistes, individualistes et sans grande éducation malgré leur diplômes et leurs études supérieures, que faire ?
Une personne que j’aime plus que tout au monde, le compagnon de mes espoirs, de mes joies, mes peines, mes angoisses et mes rêves m’a souvent parlé d’un bouton (reset) sur lequel on appuie, et hop ! On efface tout et on refait, à nouveau, sur de bonnes bases avec de nouvelles fondations bien solides, tout un monde, cela serait trop beau pour être vrai et réalisable !!! Mais bon, puisque le rêve est permis alors rêvons mais soyons réalistes quelque peu afin de ne point perdre le sens de la réalité.
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