Notice: Undefined variable: relatedArticlesCount in /home1/datalyz/public_html/tounsia/plugins/content/tags.php on line 149
Carnets de voyage [15] - Ce que le Tunisien ne veut pas comprendre
Par Aida Cherif :
Il fut un temps, dans les années 80s, où le Tunisien comparait son pays aux pays du sud de l’Europe, ceux du bassin méditerranéen.
Aujourd’hui, la donne a changé, le tunisien s’est mis à comparer la Tunisie avec les pays voisins, alors que ces pays là sont nettement moins développés, moins ouverts et moins modernes que la Tunisie de façon générale et sur le plan social particulièrement...
Lors d’un dîner avec des amis, nous avons abordé la question pouvoir d’achat et niveau de vie et surtout la cherté de la vie en Tunisie pour la bourse moyenne, franchement les avis étaient partagés entre ceux qui trouvent que réellement la vie est chère en Tunisie, d’autres trouvent que la Tunisie c’est le paradis en comparaison avec ce qui se passe chez nos voisins.
Le débat, sur plein de sujets s’est lancé, et je trouvais que ceux qui comparaient la Tunisie à des pays moins développés, moins ouverts et moins modernes, tombaient systématiquement dans le défaitisme. J’entendais dire des phrases telles que « on n’y peut rien, nous ne sommes pas un pays riche donc faut pas se comparer à la France ou l’Italie, nous en sommes loin » oui certes, nous en sommes loin, mais l’on ne peut se retourner vers ceux qui sont inférieurs, si le peuple tunisien se mettaient à regarder plus bas c’est le gouffre qui l’attend.
Être conscient que son pays n’est pas riche, est une bonne chose, mais en faire un argument principale pour justifier la cherté de la vie est une vision très limitée des choses, car nous avons des richesse autre que les ressources naturelles qui ne font pas forcément la richesse des pays qui les possèdent, à voir l’état des pays comme le Nigéria, ou l’Algérie (pays du continent africain) où le pétrole constitue une base importante des économies de ces pays là et voyez le niveau de vie dans ces pays là, ils ne sont pas à envier, et sur le plan social c’est une vraie problématique : des guerres civiles qui éclatent à tout bout de champ au Nigéria et l’installation des mouvements islamistes radicaux en Algérie qui ont fait reculé le pays d’au moins 50 bonnes années, donc c’est quoi la richesse, si elle ne sert ni le peuple, ni le citoyen et ni la société ?
Ce que le Tunisien ne veut pas comprendre, c’est que la Tunisie est un petit pays où il n’existe pas de richesses naturelles mais où il existe des hommes et des femmes qui ont eu droit à l’éducation gratuitement, en Tunisie le taux d’alphabétisation est le plus important en comparaison avec les pays arabes et nous sommes très bien classés en comparaison avec l’occident en général, ceci constitue une richesse en soi qu’il faut exploiter et fructifier afin de s’élever au niveau des pays qui nous devance et non pas se contenter d’en faire un atout majeure pour dire qu’en Tunisie c’est le paradis en comparaison à d’autres pays .
Le Tunisien ne veut pas entendre qu’un citoyen ne doit pas se demander ce que son pays a fait pour lui mais doit toujours se demander ce que lui ,en tant qu’un individu, a fait pour son pays, c’est juste à ce moment là qu’il comprendra que son pays est loin derrière les pays développés et c’est là que l’ambition de faire plus et mieux s’installe dans son esprit tout en regardant plus haut et non pas en bas .
Mes amis n’étaient pas très d’accord avec ce que j’ai dit, alors, je leur ai sorti l’exemple de la femme qui fait le ménage chez elle, tout est propre mais sur le trottoir devant chez elle, elle a laissé toutes les saletés qu’elle a sortie de sa maison, je voulais leur faire comprendre que pour qu’une société et un pays en général avance l’individu ne doit pas penser qu’à lui-même et les siens, mais doit toujours avoir en tête qu’il vit dans une société, et dans un pays qu’il faut servir au mieux avec ce qu’on peut, l’altruisme fait, malheureusement, défaut dans notre société tunisienne actuelle, autrefois les gens s’organisaient et faisaient des choses ensemble dans des quartiers et dans les médinas, aujourd’hui, les Tunisiens ne sont même pas capables de s’organiser pour désigner un syndic pour gérer les affaires d’une cité résidentielle, des immeubles construits il y a 5a ns, sont délabrés, mal entretenus et surtout devenus insalubres, parce que ceux qui les habitent ne comprennent pas que leur chez eux ,c’est pas juste l’appartement qu’ils habitent mais, le palier, l’escalier et le petit jardin autour.
Le Tunisien ne veut pas comprendre ni entendre, que c’est le citoyen qui doit lancer la machine et les moteurs du développement, l’Etat fait ce qu’il peut mais sans l’aide de l’individu, c’est comme verser de l’eau sur du sable, rien ne peut avancer.
Un de nos amis, un cadre supérieur dans un ministère, nous dit, oui mais tout n’est pas noirs chez, il y a des gens qui travaillent et font beaucoup d’efforts pour faire avancer les choses, je lui ai dit que c’était trop peu, une main ne peut applaudir car il en faut deux. Quand c’est un petit groupe qui s’active pour optimiser les chances et faire avancer les choses, c’est insuffisant pour tirer toute une société, pourtant ce ne sont pas les campagnes de sensibilisations qui manquent, surtout au niveau de l’hygiène, la sécurité routière et l’économie de l’énergie, mais cela reste très peu pour persuader tout une société de l’enjeu. En effet le développement c’est un processus qui se réalise sur le long terme, on en voit pas les couleurs aujourd’hui, peut-être demain mais entre temps il faut persévérer et ne pas lâcher.
Une autre amie nous dit que la politique du pays n’encourage pas, nous sommes limités dans nos actions et nous n’avons plus cet esprit d’initiative, il existe une peur chez l’individu de sorte qu’il craint de se lancer dans un projet quelconque.
Oui, certes en l’absence de libertés, on ne peut rien, mais regardons un peu ce que la liberté a fait en Algérie. Dans une société fragilisée par une économie restreinte et criblée de dettes, la démocratie devient cette bête noire qu’il ne faut surtout pas réveiller, et puis laissons la politique pour ses adeptes , le pluralisme en Tunisie n’a jamais eu de succès, le tunisien n’a pas besoin d’être politisé pour vivre et faire avancer son pays, et puis il faut que le peuple tunisien atteigne une certaine maturité pour pouvoir prétendre à la démocratie qui est un long processus qui s’étale sur des décennies, quand le Tunisien aura compris que la solidarité et l’altruisme sont des atouts majeures pour changer les choses à ce moment là on peut dire qu’une avancée est réalisée et que l’on est capable d’aller de l’avant. Il suffit pour cela de voir un peu ce qui se passe en Amérique latine, des pays comme le Chili, longtemps sous une dictature féroce, aujourd’hui c’est une vraie démocratie, cela a coûté la vie à beaucoup mais quand le peuple a compris que la force n’est pas l’allié principal de sa cause mais plutôt la solidarité, l’altruisme et la conscience de ses droits et ses obligations face à sa nation, c’est seulement à ce moment là que la dictature est tombée et qu’un régime démocratique s’est installé.
Ce que le Tunisien ne veut pas comprendre c’est que tant que les mentalités ne changent pas, rien ne se fera et tant que le Tunisien est individualiste ne pensant qu’à sa propre vie, aucune avancée ne pourra se réaliser, pourtant ce même Tunisien est tout à fait capable d’optimiser sa vision des choses et changer, pour que les choses changent et, souvent, on dit que l’individu peut entrainer un groupe, le groupe peut se rallier à d’autres groupes et ainsi se fait la chaîne de la solidarité .
Lire le volet précédent Lire le volet suivant